Article Médiapart, 9 avril 2023 - À Nice, le logement social au mérite
Alors que certains habitants du parc HLM de Nice vivent dans des conditions inquiétantes d’insalubrité, le bailleur social Côte d’Azur Habitat a lancé une gestion paternaliste et sécuritaire de son parc en brandissant la menace d’expulsion au moindre écart des habitants.
(...) Une convention signée en avril 2021 entre Côte d’Azur Habitat, la préfecture et le procureur de la République permet aussi un « partage d’information » sur les locataires. Selon ce texte, une expulsion peut être prononcée contre une famille dont l’un des membres aurait commis un délit ou n’en serait que soupçonné.
« Il suffit de faire l’objet de poursuites, donc d’être présumé innocent, pour être expulsé ainsi que sa famille. Mais expulser des enfants en bas âge parce que leur grand frère a basculé dans la délinquance, c’est de la punition collective », s’indigne David Nakache, président de l’association Tous citoyens, qui dénonce « un abus de pouvoir flagrant » de la part du bailleur.
« Si je suis locataire dans le privé et que mon fils commet un délit, mon propriétaire n’a pas à le savoir. Là, on s’arroge le droit de faire un signalement car il s’agit du logement social et donc de personnes sans grands moyens », relève-t-il.
Contacté, le procureur de la République de Nice, Xavier Bonhomme, précise aussi que « les mains courantes des forces de l’ordre et rapports d’intervention dressés par la police municipale pourront être communiqués en réponse à une demande formalisée par le bailleur social. La communication au bailleur social d’informations résultant de procédures judiciaires n’est donc pas automatique mais soumise à l’appréciation personnelle du procureur de la République ».
L’argument de Côte d’Azur Habitat est de dire que les habitants ont signé le règlement intérieur qui les soumet à ces nouvelles règles. Mais compte tenu de la rareté du logement social, ont-ils vraiment eu le choix ?
Pour David Nakache, le président de Côte d’Azur Habitat « a transformé le parc social en outil sécuritaire. Il y a déjà des critères précis pour obtenir un logement social, mais CAH y rajoute un critère moral sous-jacent ».
Dans une allocution publique, Anthony Borré avait affirmé qu’il ne fallait « pas de logement social pour les ennemis de la République ». Une formule choc qui avait quelque peu ému. « C’est le discours de Macron contre les djihadistes avec des amalgames insupportables », déplore David Nakache. (...)"
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